Imaginez qu’à chaque fois que vous marchez vous faites un petit bruit, un couinement, un grincement. C’est ce que l’on appelle le « squeaking ». Ce phénomène rarissime peut survenir à la suite d’une arthroplastie de la hanche mais son mécanisme causal n’est pas toujours évident à établir.
Cas d’un chirurgien orthopédiste défendu par le cabinet Lacoeuilhe suite à une plainte pour squeaking
Un patient bénéficie d’une arthroplastie de hanche droite, avec des suites parfaitement simples, hormis une subluxation laquelle finalement se remet spontanément.
Pourtant, quelques mois après l’intervention, le patient commence à ressentir des « crissements et vibrations » provenant de cette hanche. Hormis quelques douleurs, le patient s’accommode de cette hanche grinçante pendant plusieurs années – ce qui lui valut même, raconte-t-il, le surnom de « Robot Coop » par ses collègues de travail !, jusqu’à ce qu’il décide de consulter un autre chirurgien orthopédiste qui constate le phénomène de squeaking malgré une bonne position des implants.
Après réalisation d’une viscosupplémentation, un changement prothétique est finalement réalisé, permettant d’aboutir à la disparition du phénomène de squeaking.
C’est dans ces conditions que le patient dépose une demande auprès de la Commission Régionale de Conciliation et d’Indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales à l’encontre, notamment, du chirurgien.
La Commission désigne un collège d’experts, qui, après avoir réuni et entendu l’ensemble des parties, valide l’intégralité de la prise en charge du chirurgien. Les experts préciseront que, le squeaking est un phénomène « très rare, de l’ordre de 1 à 10% selon les auteurs », dont le mécanisme causal n’est pas toujours évident à établir (il peut s’agir d’un troisième élément au décours d’un traumatisme minime, d’une augmentation de l’IMC, d’un défaut de céramique, …). A noter également que les hommes seraient plus touchés que les femmes…
Dans le cas présent, l’hypothèse d’une micro fracture survenue lors la subluxation, et d’un troisième corps dans le couple de frottement pouvait expliquer les phénomènes de grincement. Néanmoins, l’analyse des pièces prothétiques n’ayant pas été réalisée, il n’existe aucune certitude…
Les Experts concluaient donc à la survenue d’un accident médical, bien que le mécanisme n’ait pas pu être établi, avec comme possibles facteurs de survenue du squeaking, la survenue d’un microtraumatisme et l’obésité du patient.
Aux termes de son avis, la Commission ordonnait une nouvelle mesure d’expertise qui avait lieu 2 ans plus tard.
A l’instar des premiers experts, le nouveau collège d’experts conclura à la survenue d’un phénomène rarissime, exclusif de toute faute du chirurgien « en l’absence de malposition évidente des pièces prothétique ».
La Commission, qui rendra son avis dans quelques semaines, devrait donc manifestement exclure toute responsabilité du chirurgien dans la survenue de cette complication.
Ce cas d’espèce est une intéressante application des règles de responsabilité en matière médicale : le dommage ne saurait suffire pour retenir la responsabilité du praticien, dès lors que son mécanisme est incertain. Seule la démonstration d’une faute du professionnel de santé, en lien certain avec le dommage, permet d’engager sa responsabilité.
Cette notion est essentielle et juste : il s’agit d’un vrai rempart, face aux demandes croissantes et souvent inconsidérées, lorsque le praticien a parfaitement exécuté sa prestation.
Dans le cas présent, la constatation sur les clichés radiographiques de la bonne position de la prothèse a permis d’exclure toute faute et de valider la prise en charge du praticien.
Georges LACOEUILHE Constance TRANNIN
Avocats à la Cour – Cabinet LACOEUILHE & Associés