Trouble Dysphorique Pré-Menstruel : Approches Thérapeutiques

Trouble dysphorique pré-menstruel

Le Trouble Dysphorique Pré-Menstruel (TDPM) est un syndrome très méconnu, mais néanmoins répandu, touchant environ 3 à 8% des femmes. Il se caractérise par des troubles psychiques, voire psychiatriques, sévères survenant pendant la période prémenstruelle. Bien qu’il soit répertorié dans le DSM-V (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders), la littérature scientifique à son sujet demeure rare. La description de ce trouble repose principalement sur des observations cliniques.

Etiologie du TDPM

L’étiologie du TDPM reste mal comprise. Il n’a pas été mis en évidence d’anomalie biologique des stéroïdes sexuels, mais il semble que cela se joue dans les variations de l’équilibre oestro-progestatif de la phase lutéale. Des facteurs génétiques prédisposant ainsi que des profils dépressifs liés à une faible sérotonine peuvent également être des facteurs favorisants.

Physiopathologie du TDPM

Ce trouble touche principalement les femmes âgées de 30 à 45 ans. Ses caractéristiques distinctives incluent une alternance entre des troubles psychologiques sévères, pouvant commencer dès le début de l’ovulation et précédant toujours les règles, suivies d’un intervalle libre survenant après les menstruations. Le TDPM disparait à la ménopause.

Les symptômes du TDPM comprennent :

  • des épisodes d’instabilité émotionnelle tel que des états dépressifs marqués avec idées noires
  • une hyperémotivité
  • des humeurs dépressives
  • une anxiété accrue
  • des troubles de la mémoire et de la concentration
  • une diminution de l’intérêt pour les activités habituelles

Les symptômes peuvent parfois se manifester sous forme d’épisode d’agressivité. Ces manifestations entravent considérablement la vie quotidienne, tant sur le plan relationnel que professionnel. Contrairement au syndrome prémenstruel où la symptomatologie est moins sévère, se manifestant par des mastodynies, des troubles de l’humeur et du sommeil, des céphalées ou encore des compulsions sucrées, les manifestations du TDPM ont une composante psychiatrique distincte et sévère.

Une particularité du TDPM est sa disparition quasi-immédiate avec le début des règles, ce qui peut parfois conduire les femmes à croire à tort qu’elles souffrent de troubles bipolaires. Ces symptômes sévères sont limités à la phase prémenstruelle, mais comme ils réapparaissent à chaque cycle, ils entraînent néanmoins une altération significative de la fonction sociale et de la qualité de vie.

Bien que peu d’études soient disponibles à ce sujet il est possible de distinguer deux profils de femmes touchées par ce trouble :

  • Celles sans antécédents psychiatriques et présentant un véritable intervalle libre avant l’ovulation
  • Celles présentant déjà un terrain anxio-dépressif, dont les symptômes s’aggravent significativement en seconde partie de cycle, après l’ovulation

Prise en charge du TDPM

La prise en charge du TDPM est essentielle pour aider les femmes à gérer les symptômes souvent invalidants de ce syndrome. Elle nécessite une approche individualisée.

Tout d’abord, il est crucial d’écouter attentivement les patientes et de reconnaître la gravité de leurs troubles psychiatriques, souvent minimisés par méconnaissance. Les femmes doivent se sentir comprises et validées dans leurs symptômes. Un suivi attentif et une collaboration étroite entre les patientes et les professionnels de santé sont essentiels pour trouver la meilleure stratégie thérapeutique adaptée à chaque cas.

L’approche non-médicamenteuse

Les approches non médicamenteuses telles que l’activité sportive, la pratique de la sophrologie lors des périodes symptomatiques sont proposées.

Des modifications diététiques sont également conseillées, incluant une augmentation de l’apport en glucides complexes, une diminution de la consommation de sucre, de sel, de caféine et d’alcool. Une supplémentation avec des compléments alimentaires comme le magnésium, le calcium et la vitamine E est également recommandée à ces femmes.

L’approche médicamenteuse

En ce qui concerne le traitement médicamenteux, l’accent est souvent mis sur la seconde moitié du cycle menstruel, c’est-à-dire après l’ovulation.

En première intention, on peut proposer la progestérone micronisée en seconde phase du cycle. Il sera toutefois souvent nécessaire de passer à un anovulant (pilule oestroprogestative ou progestative pure) pour réguler les fluctuations hormonales.

Cependant, il est important de noter que chez les femmes atteintes de TDPM, il peut falloir plus de temps pour mettre l’axe hypothalamo-hypophysaire au repos. Des symptômes liés à l’initiation de la contraception hormonale, tels que des mastodynies ou un spotting peuvent persister plus longtemps que chez une femme sans TDPM, nécessitant souvent jusqu’à 3 à 4 mois pour que les effets bénéfiques se fassent sentir. Les patientes doivent être encouragées à persévérer pendant cette période d’ajustement.

Les troubles de l’humeur majeurs diminuent toujours mais en cas de persistance d’un état anxio-dépressif la prescription concomitante d’un inhibiteur de la recapture de la sérotonine à faible dose (escitalopram 10 mg par exemple) peut s’avérer utile.

Les contres-indications

En cas de contre-indication ou de refus de la prise d’un contraceptif, la prise d’antidépresseurs de la famille des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine peut également être possible de manière séquentielle pendant les périodes post-ovulation. Chez les femmes étant déjà sous IRS (inhibiteurs de la recapture de la sérotonine) on peut augmenter les doses pendant les périodes symptomatiques de la seconde moitié du cycle.

Ces traitements réduisent la sévérité des crises.

Cependant certaines femmes sont réticentes à la prise antidépresseurs et préfèrent avoir une semaine où elles vont présenter des symptômes de TDPM sévères pour ensuite avoir trois semaines de bien être psychique.

Ménopause artificielle

Une autre possibilité thérapeutique consiste à induire une ménopause artificielle par les analogues de la LHRH. Cette approche ne peut être que temporaire en raison des risques osseux et vasculaires d’une ménopause précoce. Elle peut néanmoins être justifiée, à titre compassionnel permettant à ces femmes de retrouver une vie « normale » pour quelques mois.

Par ailleurs, la disparition complète des symptômes sous analogue confirme le diagnostic en cas de doute.

En conclusion, il est essentiel de reconnaitre le Trouble Dysphorique Pré-Menstruel comme une maladie sévère et invalidante. Le diagnostic de TDPM repose sur sa temporalité prémenstruelle, la présence d’un intervalle libre postmenstruel, sa récurrence à chaque cycle.

Il se différencie du syndrome prémenstruel standard par la sévérité des signes psychiques entraînant des conséquences graves sur la vie quotidienne des patientes.

Enfin, sa prise en charge nécessite une approche thérapeutique adaptée et une prise en charge individualisée pour répondre aux besoins spécifiques des femmes touchées par ce trouble. Cette prise en charge peut, le cas échéant, se faire en collaboration entre le gynécologue et le psychiatre.


D’après une interview du Dr Odile Bagot, gynécologue obstétricienne.